Son corps était enduit d'une pâte brunâtre et malodorante. Des tatouages lui masquaient la moitié du visage et le torse... Il portait un simple pantalon de toile brune raidie par la saleté, et des vieilles chaussures en peau de castor trop petites qui laissaient dépasser le bout de ses doigts de pied... Ses cheveux châtains étaient devenus longs et emmêlés. Je n’aurais jamais pu le reconnaître s’il n’y avait eu ces yeux… Ces deux grands yeux bruns, presque noir, perçants, mettant à nu le regardé, ces yeux qui étaient la « marque de fabrique » de notre famille. Quel âge a-t-il aujourd’hui ?? 15 ans ?? oui 15 ans… et plus rien en commun avec nous, sauf peut être un peu de pitié… Heinum… de la pitié… c’est tout ce qu’il éprouvait pour nous… Mais alors… Pourquoi…pourquoi a-t-il refusé d’abattre son poignard ??
La mule de Neharmack se cabra légèrement, ramenant le jeune homme à la réalité… La petite compagnie de dix hommes avançaient prudemment le long d’une ravine de la rivière. Les pierres glissaient dangereusement, forçant les hommes à faire attention quand ils conduisaient des bêtes. C’est tout ce qu’il restait du village… Une dizaine de vaches et de chèvres, trois poules et une douzaine d’humains dont deux adulte : Neharmack et sa cousine Pimtille. Sa main fraîche se posa sur l’épaule dénudé de son cousin, et sa voix limpide comme les multiples gouttes des cascades qui chutaient en dessous d’eux lui dit :
"Tu n’es pas son ravisseur, tu n’es pas son destin, tu es seulement son frère. N’oublies pas mais vois autrement : il t’a laissé en vie. Il t’aime et ne t’as pas oublié. C’est son éducation qui l’a transformé… c’est ta vision de la vie et ton amour qui l’on ramené à la réalité. C’est pour ça que tu es toujours en vie… Ne t’enfermes pas plus dans un silence de prostrée. Nous avons une bande d’enfants à faire vivre. Seule je ne pourrai jamais y arriver. J’ai besoin de toi… Neha’, tu m’écoutes ???"
Les yeux du jeune homme s’était teinté de rouge. Son esprit était reparti sur les sentiers de la haine…
L’attaque avait eu pendant la nuit, en pleine saison de récoltes. Jamais les Harads n’avaient attaqués pendant cette période, et personne n’était près pour un combat. Les assaillants avaient fondu sur le village et tué la moitié des habitants avant que l’alerte ne soit donné. Neharmack était sorti en vitesse, suivi de son père après que la corne de brume ai sonnée. Trois immense guerriers se tenaient devant leur entrée. S’en suivi une série de combat en corps à corps, la mort de son père, l'achèvement des trois guerriers barbares... Une dernière silhouette s'était approchée, beaucoup plus petit, mais absolument pas chétive. Elle portait deux sabres qu'elle pointait sur Neharmack. Celui-ci n'en pouvait plus et s'était agenouillé. La silouhette s'était rapprochée inexorablement, calmement. D'un geste rapide et net, les deux sabres fendirent l'air et entaillèrent la peau de l'humain, sous ses yeux. Le sang coulait des blessures comme deux larmes rubi, et la silhouette s'était penchée jusqu'à l'oreille de Neharmack pour prononcer ces mots :
"Je ne te tue pas parce que je ne t'ai pas oublié, parce qu'il me reste un peu de pitié pour les humains de ton genre. La prochaine fois, j'aurai oublié toute civilité... mon frère..."